Article publié le 20 février 2010
Le consumérisme est comme toutes les choses en « isme » une exagération et dans ce cas une exagération de la consommation. Nous devons consommer pour vivre et survivre. C’est indéniable. Ce qui pousse à l’exagération est le manque qui ne diminue pas, ou seulement passagèrement, avec la consommation. Cette sensation de manque cherche une compensation permanente par tous les moyens possibles imaginables par le sujet.
Le manque vient du fait que l’homme n’est pas fini. Lorsque l’homme sera fini, réalisé totalement, il baignera dans ce que certains appellent le paradis. L’ancien testament nous dit que l’homme et la femme vivaient dans le paradis et qu’ils ont péché. En conséquence ils ont été chassés et ont du subvenir à leur besoin par leurs propres moyens. C’est une vision que je ne partage pas pour de multiples raisons que je ne peux détailler ici. Je préfère penser que l’homme n’est pas fini, qu’il est sur la voie de sa réalisation totale. En quoi n’est il pas fini? Il lui manque la plénitude de Dieu. Quand l’homme est parvenu à sa réalisation, il baigne dans la connaissance qui lui procure une totale sécurité et une plénitude absolue. Dans ce cas il n’a absolument pas besoin de consommer outre mesure les fruits de ce monde. Hélas nous n’en sommes pas là.
Nous baignons de plus en plus dans l’ignorance car nous sommes de plus en plus vides de Dieu. Pourtant tout est là au dedans de chacun. Le manque de Dieu ou d’Être, induit chez le sujet une insatisfaction considérable, une peur immense et une ignorance abyssale. De nos jours les hommes ne se tournent pas vers Dieu pour combler ce manque mais vers l’extérieur. Ils se tournent vers le conjoint, vers la famille ou la société et ce qu’elle produit. L’homme a besoin de se rassurer, de se satisfaire, et de savoir pour y parvenir. Tout cela il le puise dans le monde extérieur à lui.
Aujourd’hui on peut commencer à s’apercevoir que le consumérisme tourné vers les biens matériels plafonne et donne même quelques signes de régression. Ce qui alerte évidemment les responsables chargés de faire brouter les moutons là ou cela leur rapporte. Il faut booster la consommation, augmenter la croissance pour que les riches soient encore plus riches pour combler leur manque d’Être et leur donner l’illusion d’être quelque chose ou quelqu’un. Certains parlent de nouvel art de vivre en se tournant vers la spiritualité et prétendent diminuer le consumérisme en intégrant dans leur vie une dimension spirituelle. D’un point de vue théorique c’est tout à fait valide. Mais d’un point de vue objectif, ce n’est pas la même chose. Le phénomène me paraît assez simple. Les personnes déçues par la consommation de biens matériels se tournent vers l’immatériel. Ils assimilent le plus souvent la spiritualité à l’énergie, au savoir ésotérique, et aux pratiques qui en découlent, en fait tout ce qui est immatériel. Cet engouement attire son lot de marchands plus ou moins sérieux, plus ou moins scrupuleux. Précédemment les religions étaient une sorte de garde fou qui empêchait les gens de se tourner vers un peu n’importe quoi. Elles ont tellement perdu de leurs crédits que maintenant la plupart se tournent vers des propositions dites spirituelles qui ne sont pas en lien avec la tradition. Cette tendance ne fait qu’éloigner encore plus le sujet de lui-même. Au lieu d’aller chercher des plaisirs dans le supermarché du coin, il va chercher sa satisfactions dans les fruits que le ciel doit lui apporter. On s’éloigne de plus en plus de son centre, de plus en plus de soi donc de Dieu.
Ce n’est pas la quête qui change mais l’objet. En fait le quêteur est le même, il change juste d’objet. On passe de la fraise à la vanille. Le sujet veut obtenir satisfaction sans avoir changé lui-même. Il est impossible d’être totalement satisfait par une quête spirituelle authentique. Le manque sera toujours là jusqu’au jour de la réalisation totale. Le manque est une souffrance et personne ne veut accepter de souffrir, de vivre avec ce manque, avec cette absence qui est motrice. Celui ou celle qui est totalement comblé par sa démarche spirituelle ne peut l’être que passagèrement. Le manque revient après un moment de satisfaction. Ces moments étant comme des carottes qui nous aident à continuer sur la voie. C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne faut pas s’y attacher. On peut être comblé, c’est mon cas, et malgré cela vivre avec le manque de Dieu. Je suis comblé mais tu me manques, quel paradoxe. Ce qui signifie, je suis porté par la foi mais Tu me manques.
Le consumérisme se caractérise par le fait que le sujet attend une satisfaction en provenance de l’extérieur. La spiritualité propose d’aller vers l’intérieur et de puiser à la source qui est au cœur de chacun. Pour cela il faut se mettre ne route dans la bonne direction et ne pas attendre de satisfactions importantes immédiates. Il faut accepter de perdre les satisfactions venues de l’extérieur pour pouvoir goûter aux joies de l’intériorité. Le changement est considérable. On ne peut pas boire à deux sources en même temps. L’une doit baisser pour que l’autre grandisse. Je constate très fréquemment que le besoin de satisfaction est tel qu’il doit se concrétiser immédiatement ou presque. La réalisation totale en trois jours. Les promesses sont absolument époustouflantes. Tout tout de suite, sans effort ni souffrances. Il faut bien cela pour attirer le consommateur. Ce sont ces propositions qui font recette. C’est bien la preuve que le consumérisme a encore de beaux jours devant lui.
Pourtant des personnes se tournent vers le cœur, elles ne sont pas légions mais elles se multiplieront.